DES LIMITES DE LA DEMOCRATIE ET DU SUFFRAGE UNIVERSEL – 1) QU’ES-CE QUE LA DEMOCRATIE ?

Ces derniers mois il y a eu pas mal d’élections en Afrique et dans le monde et tout le monde parle de démocratie, de vote démocratique ou non etc…

En fait si vous cherchez « les formes de gouvernement » sur le net, la tendance est de montrer qu’il y a « des gouvernements démocratiques » et « d’autres qui ne le sont pas ». En clair, la tendance est que pour qu’un gouvernement soit bon, il doit être une démocratie. Alors j’ai essayé de poser quelques questions autour de moi. J’ai demandé à certains amis, c’est quoi la démocratie selon eux ? Dans 99% des réponses ils disaient que la démocratie c’est « Le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple », la fameuse phrase prononcée par Abraham Lincoln lors du discours de Gettysburg.

Ensuite, j’ai essayé de faire quelques recherches sur les états démocratiques en Afrique (car c’est ce qui m’intéresse réellement) et vous serez surpris de constater que presque tous les gouvernements « se déclarent » démocratiques.

Je dois donc avoir raté quelque chose, car pour moi si les gouvernements sont tous démocratiques, il ne devrait pas y avoir de troubles pré et postélectoraux, de soulèvements populaires, de grèves, de mécontentements politiques, des répressions du peuple… comme on en voit partout en Afrique et dans le monde entier. J’ai donc continué mes recherches et j’ai lu quelques grands auteurs, du moins ils sont considérés ainsi par d’autres experts, qui ont été expertisés par d’autres et ainsi de suite, et j’ai lu pas mal de chose :

J’ai lu un auteur ou des auteurs qui parlaient «de l’importance d’indigénisation de la démocratie » en Afrique (Mamadou Diouf et Jean-Pierre Dozon dans ‘Les expériences démocratiques en Afrique’).

« Depuis 2000, des élections multipartites ont été organisées dans 49 des 53 pays du continent. La démocratie électorale paraît ainsi implantée dans nombre de pays africains, au moins sous une forme partielle » (Vincent Darracq et Victor Magnani dans Les élections en Afrique, un mirage démocratique ?)

« La démocratie dans son ensemble doit avoir un axe autour duquel elle peut graviter : des systèmes politiques pour le choix et le remplacement du gouvernement par des élections libres et équitables ; la participation active du peuple, en tant que citoyens, dans la vie politique et civile ; la protection des droits de l’homme pour tous; l’état de droit dans lequel les lois et procédures s’appliquent à tous les citoyens. » (Alex Njeru Ndungu dans ‘Les limites de la démocratie africaine’).

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Comme vous l’avez sans doute remarqué, la définition de la démocratie n’est pas aussi simple que Lincoln l’aurait décrite en quelques lignes. Il faut y ajouter d’autres subtilités comme « indigénisation, domestication, partielle, axe de gravitation, élections…), si bien que j’ai du faire appel à un autre expert pour nous départager.

« Le terme démocratie (du grec ancien δημοκρατία / dēmokratía, aujourd’hui souvent interprété comme « souveraineté du peuple », combinaison de δῆμος / dêmos, « peuple » et κράτος / krátos, « pouvoir », ou encore kratein, « commander »), est le régime politique dans lequel le peuple a le pouvoir (avec la distinction à faire entre la notion de «peuple» et celle plus restrictive de « citoyens » : en effet la citoyenneté n’est pas forcément accordée à l’ensemble de la population). La première démocratie connue est la démocratie athénienne avec comme bases primordiales l’assemblée générale des citoyens et le tirage au sort en politique. » WIKIPEDIA

On dirait que les choses ne s’améliorent pas vraiment. Mais une chose est claire, qui dit démocratie dit en apparence ou strictement ou idéalement « Pourvoir au Peuple ».

La question qui m’est venue automatiquement et que je vous pose à vous aussi est : Est-ce que le Peuple a jamais eu le Pouvoir ? Ou bien c’est moi qui comprends mal ce que veut dire « Pouvoir au Peuple ou Gouvernement par le Peuple » ? (ça fait deux questions je sais)

On dit si tu ne comprend pas, il faut demander, j’ai donc posé la question sur Google :

« De façon générale, un gouvernement est dit démocratique par opposition aux systèmes monarchiques d’une part, où le pouvoir est détenu par un seul, et d’autre part aux systèmes oligarchiques, où le pouvoir est détenu par un groupe restreint d’individus. Néanmoins, ces oppositions, héritées de la philosophie grecque (notamment de la classification d’Aristote et de Polybe) sont aujourd’hui équivoques de par l’existence de monarchies parlementaires. D’autres, dont Karl Popper notamment, définissent la démocratie par opposition à la dictature ou la tyrannie, considérant qu’elle permet au peuple de contrôler ses dirigeants, et de les évincer sans recourir à une révolution. (Une Encyclopédie numérique…). »

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Les choses deviennent plus « sensées », ne trouvez-vous pas ? C’est clair maintenant que la « démocratie », comme je le pensais, est un système « idéal » et que dans la réalité, elle n’existe pas, du moins, c’est ce que je crois vue mes observations, de par le monde, pas seulement en Afrique et au vue de ces explications.

Ce que nous appelons aujourd’hui par démocratie n’est qu’un gouvernement représentatif, mais est-ce cela la démocratie ? La vraie démocratie à mon avis, n’existe nulle part, du moins pas pour le moment.

Cette pensée est confortée par certains auteurs, je vous en cite quelques uns :

Cornelius Castoriadis ou Jacques Rancière considèrent que les démocraties représentatives ne sont que pseudo-démocratiques, où le peuple est dans les faits dépossédé du pouvoir politique effectif, qui est à leurs yeux détenu par une petite minorité d’individus (oligarchie), constitué par les politiques (représentants), les experts ou l’élite économique.

Jacques Ellul, en se fondant sur son analyse du système technicien et des moyens modernes de propagande, considère que de l’utopie d’une « démocratie-contrôle », dans laquelle l’administration étatique est réellement contrôlée par le peuple, on est aujourd’hui passé à une « démocratie-encadrement ». « La démocratie n’est plus un moyen de contrôler le pouvoir mais d’encadrer les masses », affirme-t-il dans L’illusion politique.

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Selon Noam Chomsky : la démocratie requiert une classe d’élite pour s’occuper de la prise de décisions et « fabriquer » l’assentiment de l’ensemble de la population envers des politiques qui sont supposées dépasser ce qu’elle est capable de développer et de décider par elle-même »

Sieyes quant à lui distinguait nettement démocratie et régime représentatif: « Les citoyens qui se nomment des représentants […] n’ont pas de volonté particulière à imposer. […] S’ils dictaient des volontés ce ne serait plus cet État représentatif, ce serait un État démocratique »

Il y a un gars qui est allé encore plus loin, et ce fut un grand président :

Le président américain Thomas Jefferson affirmait à la fin du XVIIIe siècle : « Il y a une aristocratie naturelle, fondée sur le talent et la vertu, qui semble destinée au gouvernement des sociétés, et de toutes les formes politiques, la meilleure est celle qui pourvoit le plus efficacement à la pureté du triage de ces aristocrates naturels et à leur introduction au gouvernement »

Pour ces personnes, célèbres et reconnus pour leur « haute » pensée, il ne pourrait y avoir de réelle démocratie et le plus proche que l’on pourrait faire c’est « un gouvernement représentatif », aussi pour éviter tout ce remue-méninge, de grands penseurs ont jugé bon de subdiviser la démocratie : il y a donc : la démocratie ‘directe’ et la démocratie ‘indirecte’ (trop fort).

Dans la démocratie directe, le pouvoir est exercé directement par les citoyens, sans l’intermédiaire d’organes représentatifs. L’idée de démocratie directe se rapporte selon les penseurs à différentes conceptions de l’exercice direct de la souveraineté par le peuple. (C’est cela la seule et vraie démocratie, mais on vient de voir que c’est une utopie, jusqu’à présent).

(Soit dit en passant, Jean-Jacques Rousseau, considèrent que la démocratie ne peut être que directe : « La souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être aliénée ; elle consiste essentiellement dans la volonté générale et la volonté générale ne se représente point. »)

Dans une démocratie indirecte, les citoyens élisent des représentants qui seront alors chargés d’établir les lois et/ou de les exécuter, raison pour laquelle ce système politique est aussi désigné sous le terme de démocratie représentative. Elle est devenue au fil du temps, dans le langage courant et par abus de langage, synonyme du terme de démocratie tout court.(Eh oui).

Cela amène donc la grande question, comment choisir ces « représentants » ? qui vont gouverner « à la place » du peuple (ne rêvez pas, ils ne vont pas gouverner « pour » le peuple, quand même hin).

4 réflexions au sujet de “DES LIMITES DE LA DEMOCRATIE ET DU SUFFRAGE UNIVERSEL – 1) QU’ES-CE QUE LA DEMOCRATIE ?”

  1. Excellent questionnement très cher. Avec pas mal de points intéressants,
    Pour ma part, je prends acte du fait que la démocratie n’existe pas. C’est un demi-mensonge. Tout système étatique devient oligarchique avec le temps. ça n’a jamais vraiment existé une démocratie. J’ai plus respect pour une aristocratie, comme le suggère Truman (même s’il faut faire attention avec ces notions aussi).

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    1. Attends un peu de lire la suite et tu verras que bien que nous ayons des avis très proches, je pense quand même qu’on peut mieux faire… mais je dirai pas tout maintenant continue de te lire… je ne maitrise pas encore le blog, mais je crois que je te suis aussi maintenant… tu me confirmeras 🙂

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  2. Petite boutade, c’est Benjamin Franklin qui décrit la démocratie comme « deux loups et un mouton qui se décident de ce qu’on va manger au diner…la différence c’est que le mouton a possède un pistolet ». 🙂

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