Comment formuler et choisir le titre de son œuvre ?

COMMENT CHOISIR OU DÉFINIR LE TITRE DE SON LIVRE ?

Vous êtes du genre à recevoir « l’inspiration » sur le titre de votre roman ? Tant mieux… Mais si comme de nombreux écrivains, vous avez des difficultés à formuler un titre pour votre œuvre, voici quelques conseils pour vous aider …

https://www.saeicube.com/articles/COMMENT-CHOISIR-LE-TITRE-DE-SON-MANUSCRIT-/show

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*CINQUIEME ATELIER VIRTUEL D’ÉCRITURE : L’INVENTAIRE*

  1. *Première étape : Les notes de chevet*

Il s’agira ici de faire un inventaire de différentes choses, les objets, les images, les scènes, les pensées, et les grouper autour d’un seul sentiment, d’une seule émotion ou d’un seul jugement ou d’une appréciation.

Vous pouvez choisir, par exemple, comme sentiment autour duquel tout grouper : « Les choses qui font battre le cœur », « Les choses dont on a honte », « Les choses qui font pleurer », « Les choses élégantes », « Les choses qui font peur », « Les choses immortelles », « Les choses périssables », « Les choses de l’intérieur », « Les choses qui rendent heureux », « Les choses amicales », « Les choses liées au premier jour d’une année », « Les choses qui ne font que passer » et cetera … à vous de décider du sentiment, du jugement, de l’élément autour duquel vous voulez grouper les choses.

Exemple : « Les choses rares », extrait de « Notes de chevet » de Sei Shônagon

« Les choses rares »

Un gendre loué par son beau-père.

Une bru aimée par sa belle-mère.

Une pince à épiler, d’argent, qui arrache bien [L’argent n’est pas un métal dur, et une pince d’argent est rarement bonne.].

Un serviteur qui ne médit pas de son maître.

Une personne sans la moindre manie, sans infirmité, supérieure au physique comme au moral, et qui reste sans défaut, alors qu’elle vit dans le monde.

Des personnes qui habitent ensemble gardent une réserve mutuelle, et je pense que chacune doit s’appliquer, sans la moindre négligence, à dissimuler son caractère. Il est bien rare qu’on ne finisse pas par le voir.

Quand des hommes et des femmes, ou des bonzes, se sont promis une amitié profonde, il est difficile qu’ils restent en bonne harmonie jusqu’à la fin.

  • *Deuxième étape : Les ravissements infimes*

Il s’agira ici de décrire ces moments d’intense volupté, d’émerveillement, de délectation qui constituent pour le sommet du bonheur de vivre. L’inventaire peut tourner autour des différents plaisirs liées à un instant de ravissement intense ou décrire plusieurs moments de ravissements qui font votre bonheur.

  • *Troisième étape : Je ne voudrais pas mourir sans*

Il s’agit pour finir de faire toujours l’inventaire, mais de choses que l’on voudrait faire, voir, connaître, sentir, toucher, goûter … avant de mourir. Que ce soient des choses graves, dérisoires, insolites, drôles, tragiques … laissez-vous aller à faire ressortir la vérité de vos désirs, envies, besoins… face à l’imminence de la mort et à la brièveté de la vie.

Exemple : « Je voudrais pas crever » poème de Boris Vian

Je voudrais pas crever Avant d’avoir connu Les chiens noirs du Mexique Qui dorment sans rêver Les singes à cul nu Dévoreurs de tropiques Les araignées d’argent Au nid truffé de bulles Je voudrais pas crever Sans savoir si la lune Sous son faux air de thune A un côté pointu Si le soleil est froid Si les quatre saisons Ne sont vraiment que quatre Sans avoir essayé De porter une robe Sur les grands boulevards Sans avoir regardé Dans un regard d’égout Sans avoir mis mon zobe Dans des coinstots bizarres

Je voudrais pas crever Avant d’avoir usé Sa bouche avec ma bouche Son corps avec mes mains Le reste avec mes yeux J’en dis pas plus faut bien

Je voudrais pas crever Non monsieur non madame Avant d’avoir tâté Le goût qui me tourmente Le goût qu’est le plus fort

Je voudrais pas crever Avant d’avoir goûté La saveur de la mort…

Bonne séance d’écriture.

IMPORTANT : *Les textes des exercices doivent être envoyés au plus tard le vendredi*, sur cubebooks1@gmail.com ou dans le groupe des Ecrivains AGAU https://chat.whatsapp.com/E0O2Pm4tRYr4pHGFpR3YWJ (Groupe réservé uniquement à ceux qui aiment écrire ou lire beaucoup … NB : Il ne s’agit pas d’un groupe de publicités ou d’entrepreneurs). La journée du samedi est utilisée pour analyser et faire des suggestions. *Des textes qui arrivent après le vendredi ne pourront pas être relus*. Merci et très bon atelier.

*CINQUIEME ATELIER VIRTUEL D’ÉCRITURE : L’INVENTAIRE*

  1. *Première étape : Les notes de chevet*

Il s’agira ici de faire un inventaire de différentes choses, les objets, les images, les scènes, les pensées, et les grouper autour d’un seul sentiment, d’une seule émotion ou d’un seul jugement ou d’une appréciation.

Vous pouvez choisir, par exemple, comme sentiment autour duquel tout grouper : « Les choses qui font battre le cœur », « Les choses dont on a honte », « Les choses qui font pleurer », « Les choses élégantes », « Les choses qui font peur », « Les choses immortelles », « Les choses périssables », « Les choses de l’intérieur », « Les choses qui rendent heureux », « Les choses amicales », « Les choses liées au premier jour d’une année », « Les choses qui ne font que passer » et cetera … à vous de décider du sentiment, du jugement, de l’élément autour duquel vous voulez grouper les choses.

Exemple : « Les choses rares », extrait de « Notes de chevet » de Sei Shônagon

« Les choses rares »

Un gendre loué par son beau-père.

Une bru aimée par sa belle-mère.

Une pince à épiler, d’argent, qui arrache bien [L’argent n’est pas un métal dur, et une pince d’argent est rarement bonne.].

Un serviteur qui ne médit pas de son maître.

Une personne sans la moindre manie, sans infirmité, supérieure au physique comme au moral, et qui reste sans défaut, alors qu’elle vit dans le monde.

Des personnes qui habitent ensemble gardent une réserve mutuelle, et je pense que chacune doit s’appliquer, sans la moindre négligence, à dissimuler son caractère. Il est bien rare qu’on ne finisse pas par le voir.

Quand des hommes et des femmes, ou des bonzes, se sont promis une amitié profonde, il est difficile qu’ils restent en bonne harmonie jusqu’à la fin.

  • *Deuxième étape : Les ravissements infimes*

Il s’agira ici de décrire ces moments d’intense volupté, d’émerveillement, de délectation qui constituent pour le sommet du bonheur de vivre. L’inventaire peut tourner autour des différents plaisirs liées à un instant de ravissement intense ou décrire plusieurs moments de ravissements qui font votre bonheur.

  • *Troisième étape : Je ne voudrais pas mourir sans*

Il s’agit pour finir de faire toujours l’inventaire, mais de choses que l’on voudrait faire, voir, connaître, sentir, toucher, goûter … avant de mourir. Que ce soient des choses graves, dérisoires, insolites, drôles, tragiques … laissez-vous aller à faire ressortir la vérité de vos désirs, envies, besoins… face à l’imminence de la mort et à la brièveté de la vie.

Exemple : « Je voudrais pas crever » poème de Boris Vian

Je voudrais pas crever Avant d’avoir connu Les chiens noirs du Mexique Qui dorment sans rêver Les singes à cul nu Dévoreurs de tropiques Les araignées d’argent Au nid truffé de bulles Je voudrais pas crever Sans savoir si la lune Sous son faux air de thune A un côté pointu Si le soleil est froid Si les quatre saisons Ne sont vraiment que quatre Sans avoir essayé De porter une robe Sur les grands boulevards Sans avoir regardé Dans un regard d’égout Sans avoir mis mon zobe Dans des coinstots bizarres

Je voudrais pas crever Avant d’avoir usé Sa bouche avec ma bouche Son corps avec mes mains Le reste avec mes yeux J’en dis pas plus faut bien

Je voudrais pas crever Non monsieur non madame Avant d’avoir tâté Le goût qui me tourmente Le goût qu’est le plus fort

Je voudrais pas crever Avant d’avoir goûté La saveur de la mort…

Bonne séance d’écriture.

IMPORTANT : *Les textes des exercices doivent être envoyés au plus tard le vendredi*, sur cubebooks1@gmail.com ou dans le groupe des Ecrivains AGAU https://chat.whatsapp.com/E0O2Pm4tRYr4pHGFpR3YWJ (Groupe réservé uniquement à ceux qui aiment écrire ou lire beaucoup … NB : Il ne s’agit pas d’un groupe de publicités ou d’entrepreneurs). La journée du samedi est utilisée pour analyser et faire des suggestions. *Des textes qui arrivent après le vendredi ne pourront pas être relus*. Merci et très bon atelier.

Inscription AGAU_RÂ8 et Prix AGAU de Littérature 2023

AGAU_RÂ8 : Plus que 7 semaines pour les inscriptions

Des formations entrepreneuriales, des ateliers d’écriture, des stages pratiques et d’autres activités prévues tout au lors des AGAU_RÂ8 sur l’année 2023.
Pour en savoir plus et s’inscrire : https://www.saeicube.com/actualite/132/show

NB : Toutes nos activités de formations ou d’accompagnement de cette année se dérouleront lors des AGAU_RÂ. Tout accompagnement en dehors des AGAU_RÂ est conditionné.

Synopsys Mémoire d’une vie

SYNOPSIS de #Mémoire_dune_vie, roman de Urbain AMOUSSOU

L’histoire démarre à Aného, petite ville au sud du Togo, sur la côte ouest-africaine, en train d’être emportée lambeaux après lambeaux par l’océan. Le narrateur, Kokou, en se rendant chez son grand-père, devra traverser ce bourg, dont les routes l’une après l’autre sont avalées par l’Atlantique. Toutefois, la beauté du lieu, paradisiaque, est bien là, et le grau (appelé localement Apounoukpa ou embouchure) reste l’un des plus beaux d’Afrique.

Dans cet élysée, vu au travers du regard du jeune narrateur, les gens sont tristes et les pêcheurs ne rêvent que d’une chose, partir, très loin, dans leurs grandes pirogues qui ne rapportent plus de poissons. Ici tout le monde veut partir et ne revenir que pour mourir, auprès de leurs dieux et dans leur paradis. Une histoire entre Amour et haine qui dure depuis des générations.

Non, loin de là, dans le village de Djéta, origine de leur famille, qui a la particularité de se retrouver exactement sur la ligne de séparation entre le Bénin et le Togo, une ligne imaginaire que la population n’arrive toujours pas à comprendre, le jeune narrateur nous présente son grand-père, Grand-pa, qui l’attend souvent, seul dans sa petite maison en briques nues.

Vieux, mais grand bavard, gardant sur le visage et sans doute dans la voix, les restes d’un passé glorieux, cet homme à l’anglicisme facile et au radotage truculent, aime raconter à son petit-fils des histoires de son passé, mais aussi les remords et les regrets, qu’il traîne tel un singe pris au piège par une banane.

Dans cette histoire, qui démarre avec la dernière visite de son petit-fils, le vieil homme décida de lui confier ses plus lourds secrets, ceux-là même qui l’empêchent désormais de partir lui-aussi heureux. L’un des secrets est si lourd qu’il sortit la statuette, celle des initiés, si hideuse que le petit-fils prit peur.

Grand-pa mena son petit-fils à la découverte de son propre père, Zadan, un homme qu’il adorait et qui représentait tout pour lui. Ce père (du vieil homme) et arrière-grand-père du narrateur, était craint et jalousé dans le village, ayant réussi à créer et maintenir la prospérité autour de lui, malgré sa nombreuse famille. Puis un jour, le drame arriva, il vit ses pirogues et filets de pêche, sources de leurs vie, se faire incendier par des inconnus. Convaincus qu’il s’agissait des gens du village, le père du vieillard également féticheur, lança un ultimatum aux villageois, menaçant de faire intervenir les fétiches.

Quelques jours après avoir menacé les villageois, l’un des fétiches les plus dangereux du père Zadan (père du vieillard), « le cinquième enfant, l’enfant sans tête », se retrouva dehors là où les pirogues avaient brûlé, au bord du fleuve. Tout le village retenait son souffle, se préparant au pire.

Les jours passant, la fin de l’ultimatum arriva, mais étrangement rien ne se passa, à la grande tristesse de Grand-pa, alors âgé de sept ans. Les villageois étaient aussi déçus, et ne manquèrent pas de se moquer de Zadan et de sa famille. Le petit garçon qu’était Grand-pa devint la risée de ses camarades.

Puis, alors qu’on ne s’y attendait plus, le malheur frappa. Les morts s’accumulèrent et vu qu’il n’y avait pas longtemps que le vieux Zadan avait menacé tout le village, tous ces décès lui furent attribués. L’homme voyant le danger planer sur sa famille, les envoya tous en ville, ne gardant à côté de lui qu’une de ses femmes et ses enfant adultes. Il finit par se faire assassiner avant que l’Etat ne vienne annoncer qu’il s’agissait d’une épidémie de variole.

Grand-pa finit par fonder sa propre famille, avec ces bonheurs et malheurs. Il fut abandonné par la femme qu’il aimait dans des conditions ubuesques et découvrit, des années plus tard, que cette dernière attendait un enfant de lui avant de le quitter. Cette enfant, qui n’est autre que la mère du narrateur, fut retrouvée dans un W.C., un début de vie difficile qui restera une source de conflits entre Grand-pa et sa fille. Dans ses tentatives de s’élever au-dessus de cette entrée délicate dans la vie, la mère du narrateur développera une soif de réussite, un perfectionnisme mais aussi un ressentiment pour son père, qu’elle essaiera d’inculquer à ses enfants.

Dans cette dernière discussion entre le vieillard et son petit-fils, ce n’est pas juste une histoire du passé, ou d’un futur qui voudrait se rattraper, c’est aussi le récit naturel d’une sénescence inévitable, solitaire, physique et immatérielle, qui craint de ne plus, bientôt, être capable d’aller aux toilettes seule, et de se retrouver mêlée à ses propres immondices.

Le narrateur partit donc, presque comme tous les enfants de ce pays, dans le paradis des autres et quand il revint, c’était sur insistance de son Grand-pa qui, dans son dernier souffle, voulait, s’assurer que quelqu’un avait pris la relève et compris son histoire. Que quelqu’un allait désormais porter la mémoire de sa vie, de leur famille. Ce fut là également que le narrateur révéla le dernier secret : comment l’enfant sans tête, le fétiche à l’origine de tout ce désastre s’était retrouvé dehors, sur la berge du fleuve, près des pirogues brûlées.

Vous pouvez faire une précommande du Roman « Mémoire d’une vie » en écrivant au 00228 90 53 51 21 ou par mail à agaufondation@gmail.com

La sortie du livre est prévue pour fin Décembre-Début Janvier

Retrouvez d’autres récits, extraits, des nouvelles et poèmes de l’auteur sur sa page personnelle https://www.facebook.com/urbainAgau/, le blog https://agaueditions.wordpress.com/, la plateforme CUBE BOOKS www.cubebooks.saeicube.com et les pages Facebook : https://www.facebook.com/CUBEBOOKS et https://www.facebook.com/AgauEditions

Melpomène

Melpomène

« J’aurais aimé t’aimer, mais je ne suis qu’un écrivain

Et nous les artistes, ne pouvons être fidèles

Si en fait, nous le sommes, mais pas à deux, ni à trois

Elles sont légion, et nous devons chanter le bonheur d’être avec chacune

Nous ne sommes que ce qu’elles décident de nous

Et parfois, vous, qui n’avez pas la foi

Vous pensez que nous vous trahissons »

« Nos écrits sont le bien que nous laissons en mourant… Alors les hommes qui nous aimaient et qui n’osaient laisser paraître leur affection prendront peut-être la parole.

Ce n’est pas seulement cette soif de gloire qui anime l’écrivain dans la solitude ; il éprouve là une autre jouissance, une jouissance inappréciable que nul autre être ne peut lui enlever »… ni lui donner.

Ces paroles de Johann Zimmermann m’avaient ébloui la première fois que je les avais lues. Je n’étais encore qu’un puceau et j’y ai cru…

Mon talent avait éclos dès les premiers printemps de ma vie. Je voyais l’envie dans le regard des autres, ceux de mon âge mais aussi des adultes. J’avais à peine 13 ans quand je compris que j’étais différent, mon art était étrange et sublime. Je ne désirais qu’une chose au monde : écrire, et à chaque fois j’y laissais un peu de mon âme et de mon sang.

Mon enseignant, au petit collège, fut le premier surpris. J’étais doué mais pas que… il y avait autre chose d’indescriptible. Ce qui faisait que mes récits plaisaient et se réalisaient. Chaque texte, chaque mot, chaque histoire, chaque personnage paraissait tisser des fils de la vie. Pourtant je n’écrivais rien d’extraordinaire.

Le secret vint à m’être révélé quand j’eus mes 21 ans. Je rencontrai en ce moment ma muse, plutôt mes muses, elles étaient nombreuses, les gardienne des arts nobles, celles qui ne se révélaient qu’à quelques élus. J’étais jeune et je tombai sous leur charme. Elles étaient l’incarnation de la beauté pure, chaque brin de leur souffle me mettait en transe et elles épuraient mes faiblesses, les drainant vers la tombe pour me laisser écorché, sensible telle une vierge la nuit de noces.

Je m’étais donné à elles et elles me donnèrent, en échange, du succès éternel, et les trois conditions qui ne pouvaient être changées.

La première règle : mes histoires doivent toujours être vraies ;

Deuxièmement, je me dois de toujours parler de la plus haute quête humaine : l’Amour. Et la troisième et non des moindres, mes histoires doivent constamment mal finir.

La recette paraissait simple et je trouvais une telle jouissance dans chaque récit qui recevait l’approbation des mortels que c’en était immoral. Mon talent n’était point feint certes, mais voir tout ce monde, vous encenser, avait quelque chose de divin, d’exaltant. L’écriture me donnait tout, la joie, les possessions, les autres, la chair… Mes chagrins s’étiolaient quand j’avais la plume en mains, même si au final je ne faisais que les transcrire dans mes vers, mots, musiques… et d’autres en portaient le fardeau. C’était cela la beauté, le fait de communiquer mes mauvaises, et parfois aussi mes bonnes humeurs aux autres, qui s’en délectaient au point d’en succomber.

Je ne saurai réellement dire celle que je préférais, tout ce que je peux affirmer est que chacune avait ses qualités et ses points faibles. Les dieux sont capricieux et les déesses pires. Je suis convaincu qu’elles étaient celles qui avaient manigancé ou forcé les dieux à créer l’autre côté. Erato aimait la compagnie de Melpomène, pourtant on aurait dû les séparer. A deux elles rendaient souvent mon âme si triste au point d’avoir envie de pleurer sur mes textes. Elles arrivaient souvent vers la fin pour clore l’histoire et donner aux lecteurs ce qu’ils aiment, la tragédie, le drame, la mélancolie, cette plainte doucereuse qui grave dans l’âme cet arrière-goût d’inachevé.

Euterpe et Terpsichore se donnaient souvent la main, mais toute la joie de vivre était démontrée par la dernière, qui un pas après l’autre donnait le tempo aux mots, glissant sur la musique chantée d’une voix enfantine par la belle Euterpe, qui n’avait pas que la voix de magnifique. Sa beauté avait déjà rendu fou et solitaire trop d’artistes. Calliope m’agaçait souvent, exigeante et aigrie, vieille folle pour qui la quête de la perfection n’avait d’égal dans le monde divin. Trop d’écrivains, de peintres avaient donné leur unique vie pour la contenter, oubliant souvent qu’elle était immortelle elle. Personnellement et plusieurs ne seraient pas d’accord, mais si je devais choisir ce serait Clio ou Melpomène mes préférées. J’ai toujours préféré l’histoire à la beauté et au lyrisme du texte.

Je contais donc les histoires des autres. Il me suffisait de les regarder, de les entendre parler, se toucher, se sourire… pour connaître le chemin et l’aboutissement de leurs idylles, et dans l’encre de ma plume, j’écrivais, je peignais leur incapacité à pouvoir jamais atteindre le bonheur, l’Amour ; je la rendais éphémère. La tragédie était là, réelle, sans aucune comédie et Thalie devrait être la plus frustrée. Qu’ils étaient naïfs de croire qu’ils resteront à jamais ensemble ! Ma plume infailliblement savait, peignait la fin de ces choses si douces. Mes muses, avec l’expérience de siècles et millénaires d’humains qui avaient emprunté cette voie, connaissaient la vérité avant la fin. Pourtant ils revenaient tous pour me lire. Ils étaient nombreux à croire que je parlais d’eux. Quelque part ce n’était point faux. Ils ne sont que les fruits d’une évolution qui n’est point encore aboutie et qui ne le sera que dans l’éternité et l’absolu. La seule chose qui nous est accessible sur terre c’est la foi.

Et ce fut à une dédicace, tout plein de gloire, que je compris, ce qu’ils pouvaient ressentir, mes lecteurs. Je tombai follement amoureux d’une humaine et j’eus foi en l’avenir. Je ne pouvais désormais plus écrire l’histoire des autres, je ne voulais qu’écrire la mienne. Alors j’ai arrêté d’écrire.

FIN

Urbain AMOUSSOU

L’Immortel_Urbain AMOUSSOU

L’IMMORTEL

Il y a des nuits où tout paraît plus vivant, l’existence prend une lourdeur qui vous écrase de toute sa réalité. Et ce n’est plus tant les humains qui sont vrais, mais l’impalpable, l’invisible.

Le père tenait la main de son enfant, il le mettait sur un chemin où il savait qu’il n’y aurait plus de retour possible. Son enfant allait désormais chercher et porter son propre nom, à nul autre pareil. Un fardeau et une bénédiction. Il regarda sa montre, 23h52. Il avait éteint les lumières de sa voiture pour ne pas déranger l’autre monde. Ils avaient failli se perdre dans toute cette obscurité, mais alors qu’ils tournaient sur un chemin de travers, le hululement d’un envoyé des maîtres de la nuit se fit entendre et il reconnut, instinctivement, le bon chemin.

Là où ils allaient nul n’y vivait, nul ne connaissait l’endroit. Seuls les initiés retrouvaient le chemin. Il avait été initié par son propre père, qui l’avait été aussi et ceci depuis la nuit des temps, depuis les temps où les hommes vivaient encore avec les dieux. Ce soir, c’était au tour de son fils, Vimakou, qui allait lui aussi recevoir son initiation et c’est presque les larmes aux yeux que son père se retourna et lui intima de sortir dans la nuit et laisser son maître intérieur le guider. Le père avait peur, cette peur qu’ont tous les pères, mais aussi les mères qui voudraient voir leurs enfants répondre à leur destin.

Le jeune Vimakou sortit dans la nuit, il n’avait pas peur, il ne tremblait pas. Il avait été mis au monde pour cet instant précis. Il huma l’air, guettant tout brin de vent, le moindre bruissement du silence, quêtant un signe, un sulfure même léger, de ceux qui n’existent plus ni ici, ni là-bas et qui, désormais, seront ses guides.

Il avança, assez, pour ne plus être perceptible à son géniteur. Il eut une pensée pour sa mère. Elle pleurait encore sans doute à cet instant. Vimakou se baissa, prit la position de prière enseignée par les maîtres, les deux genoux à terre, accroupi sur son séant, et baisa la terre du front et lança furieux à tout l’univers : « Midonoudo ».

Alors qu’il se baissait pour la énième fois, toute la terre lui répondit : « Miakpata mido ». Il était arrivé.

L’enfant disparut pour près de sept ans, et sa mère pleura autant et comme tous les hommes, son père se cacha aussi, pour pleurer, chaque nuit, vers minuit et ses environs. Ils pleurèrent longtemps, Puis un jour, le fils revint frapper à la porte de ses parents. Il n’avait pas changé. Il avait juste grandi.

Et à partir de ce moment, il endossa son nom sacré : Vimakou, la vie ne meurt point. Très vite ses parents comprirent qu’il n’était plus comme eux. Il avait été le fils du père, là il était désormais le guide de plusieurs. Le père était déjà capable d’écouter et de comprendre les êtres, même ceux qui ne parlaient pas, le fils lui était leur maître.

Vimakou ne vieillissait pas. Bien entendu tous les parents prient de ne point survivre à leur enfant, mais Vimakou était un être à part. Il ne craignait rien et tout le monde et toutes les choses commençaient à le craindre. Durant des années, alors que la vieillesse s’accaparait du corps de ses parents, de ses frères et sœurs, lui ne changeait point. Ses blessures guérissaient en une heure. Ses os se ressoudaient en une journée. Ses rides se tassaient en une semaine et son âge changeait.

Bientôt, alors que ses parents pourrissaient sous terre et que son dernier petit frère devenait sénile, il fut obligé de partir. Les mortels n’ont jamais supporté les dieux. Il vécut ainsi, de vie en vie.

Vimakou avait accumulé un savoir hors du commun, que personne ne lui comprenait, mais bien réel. Il ne pouvait leur expliquer que le temps était son allié et son maître, tandis qu’il était le bourreau de la majorité des vivants.

Un jour, bien bien après plusieurs vies, il fut invité en Angleterre et il prit un vol passant par Belfort. Tout se passait bien jusqu’à ce qu’ils soient au-dessus de la capricieuse atlantique, où les coups d’ailes d’un papillon entraînent souvent des ouragans. Ce fut d’abord un choc coupé. Puis les secousses se succédèrent. À côté de lui une jeune et belle femme voilée le regardait. Vu les circonstances, il ouvrit simplement la main et elle s’y jeta toute entière. Et durant toute la chute de l’appareil, elle ne cessa de le serrer, de le griffer et de le supplier de rester là. Il fit de son mieux, aucune parole ne fut échangée, pourtant jusqu’au dernier moment, cette jeune inconnue sut qu’elle avait eu un ami, un vrai, qui comprenait toute sa douleur et sa furieuse envie de rester en vie.

Nul ne peut expliquer la sensation que provoque les secousses en avion aux humains. Il faut vivre cela pour comprendre. Plusieurs étaient d’ailleurs morts ou avaient perdu connaissance avant que la carlingue n’heurta la surface dure de l’océan. Sous le choc, l’avion implosa et Vimakou eut juste une fraction de seconde pour s’excuser auprès de sa voisine. Il ne pouvait rien pour elle. C’était peut-être là le plus dur dans son état. Ne pas pouvoir aider les mortels qu’il aimait bien. La douleur avait toujours été du côté de ceux qui restaient. Ce n’était point son premier accident. C’était juste son premier en plein océan. Quand il se réveilla, il était accroché à un bout de caisse qui prenait l’eau.

Ce fut à cet instant qu’il se rappela, qu’au cours de toutes ces années, générations, vie après vie, mort après mort, il n’avait pas appris à nager. Il eut un sourire, tout en pensant à Roméo et Juliette, non plutôt à Titanic, il n’en était plus vraiment sûr. C’était l’un des rares films qui l’aient fait pleurer. Le bois, sous son poids ne pouvait plus tenir sur l’eau.

Vimakou, alors que sa conscience se gorgeait d’eau et que son corps sombrait dans les abysses de l’Atlantique, se rendit compte que ce n’était pas tant le fait de tomber à l’eau qui lui serait fatal, mais le fait de rester sous l’eau. Et le pire serait de ne pouvoir mourir.

FIN

Urbain AMOUSSOU

Ma folle à moi_Urbain AMOUSSOU

Ma folle à moi

J’ai connu ma femme sur le tard. La faute sans doute à mon père qui m’avait toujours dit de me méfier des femmes. Il m’a traumatisé le vieux. J’étais donc déjà dans la quarantaine quand on se rencontra. J’avais quelques soucis de cœur et elle était cardiologue.

Vous imaginez bien le genre de blagues pourries que j’ai dû faire avant qu’elle n’accepte le premier rendez-vous. Pourtant elle riait à mes blagues. Une femme intelligente et sublime Marlène. Nous étions tous les deux assez mâtures et tout se passait très bien. Elle comprenait que je sois impliqué dans mon travail et je comprenais que des patients l’appellent en pleins ébats.

Si je devais qualifier notre couple, je dirais que nous étions stables. Enfin, sauf quand madame était de mauvaises humeurs. Marlène est une femme passionnée. Il faut être passionné pour faire plus de 20 ans d’études et se spécialiser en cardiologie.

Je trouvais donc normal, quand lors de nos disputes, elle partait en vrille. Dans ces moments j’attendais calmement que la tempête passe. Mais pour un court instant, je découvrais la folle que j’avais épousée. Ce qui était drôle c’est que lors de ses accès de colère, elle utilisait des mots compliqués : hypermétrope, galénique, coronaire… Je les notais souvent et après je cherchais leur définition. Et on en riait ensemble.

Bref tout allait bien, c’était l’équilibre de la terreur, jusqu’à ce que la crise à la COVID-19 l’oblige à passer plus de temps à la maison. Les disputes se multiplièrent et le summum fut atteint le samedi 03 Mai. Un samedi. Il faut avouer que c’est aussi un peu ma faute. Pour une fois, j’avais refusé de me laisser faire.

Le confinement avait exacerbé nos frustrations à tous les deux et j’étais rentré dans son jeu. Pour dire la vérité, je ne me rappelle plus pourquoi on s’était chamaillés. Le ton monta, elle sortit des mots dont je ne comprenais pas le quart et je lui adressai de mon côté quelques bonnes vérités. Le diable était dans la maison. Nous étions à 19h15 quand elle prit ses affaires pour partir.

Je n’essayai pas vraiment de la retenir. Elle savait ce qu’elle faisait et je savais que la maison de sa meilleure amie était à peine à 30min de là. Elle partit donc et notre grande demeure devint calme. C’était bien. Cette sensation d’être libre m’avait manqué. Je ne tentai de l’appeler que le lendemain. Le téléphone sonna et c’était suffisant, je raccrochai avant qu’elle n’ait eu le temps de décrocher. Un médecin n’éteint jamais son téléphone et du moment où ça sonnait c’était rassurant.

Je passai donc un dimanche béni et le lundi je partis au boulot pour faire ma demi-journée. Je revins vers 17h et dès l’entrée je sus que quelque chose n’allait pas. La porte du salon était fracassée.

Tous mes objets de valeur avaient disparu. Tout, tout s’était évaporé. On aurait dit la chambre d’un célibataire, pire d’un étudiant célibataire qui adore la fête. Le plus terrible c’était le matelas, de notre chambre à coucher. Les malfrats, les malheureux voleurs y avaient pissé. L’odeur était nauséabonde. Ils avaient marqué leur territoire, signé leurs méfaits. J’avais besoin de soutien. J’appelai Marlène. J’avais besoin d’elle. Après plusieurs tentatives elle décrocha et dès qu’elle sentit l’angoisse dans ma voix, elle se mit en route et arriva 10 minutes plus tard.

Marlène me consola. Ces voleurs nous firent du bien, à bien y penser. N’eût été leur venue j’aurais laissé cette dispute s’éterniser et nous détruire. Je compris que j’avais besoin d’elle et que sans elle autour de moi je n’étais rien, sans elle dans notre demeure, des malfrats peuvent y pénétrer. Elle sut trouver les mots pour m’apaiser. Des mots simples, des mots doux. Elle mit ma tête sur ses genoux et me caressant le cuir chevelu, elle m’avoua que c’était elle.

Puis elle se pencha vers moi, prit mes lèvres entre ses petites dents, tandis qu’elle murmurait « je t’aime… à la folie ».

FIN.

Urbain AMOUSSOU

La fenêtre – Urbain AMOUSSOU

LA FENÊTRE

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Aujourd’hui il pleut. Ce fut la première chose qui me vint en tête quand j’ouvris les yeux. Ce n’était pas vraiment une pensée, juste une réalité qui s’est imposée à mon corps embrouillé. Je titubai en enjambant le matelas, la moustiquaire soulevée. Il y a des jours avec et des jours sans. Pourtant j’adore les jours de pluie. Elle vivifie des souvenirs d’une enfance heureuse, les gouttes de pluies sous les manguiers de la maison familiale, les poissons qui se frayaient un chemin dans les canalisations vers des destinations inconnues, pour moi, des mangues mûres qui tombaient sans se faire prier, avec des bruits doux et sirupeux

L’odeur de la terre, dont les brûlures étaient calmées par les nuages, tout ça ramenait à moi une nostalgie douce.

Plus on grandit, plus on se rend compte que nous n’avions été heureux que les premières années. Après les hommes ne vivent que dans le passé ou pour pleurer.

Il pleut. La vitre de ma fenêtre dégoulinait. J’eus envie de me rapprocher et de souffler dessus, ensuite je dessinerai un cœur, avec juste un doigt. Ce serait amusant. À quoi ressemblait le dehors. Peut-être y avait-il là une belle dame, surprise par la pluie. C’est toujours beau une jolie femme mouillée.

Tout ça pour ne pas penser à la fenêtre. Elle était encore fermée. Et cela faisait des mois maintenant que le scénario durait.

Je vérifiai les joints, juste comme ça. Je savais, mais je devais vérifier. Les jointures étaient solidement accrochées et les encoignures hermétiques. Depuis quelques semaines, à chacun de mes réveils ma fenêtre était toujours fermée. Ce n’était pas moi. Et hier en allant me coucher je me suis d’ailleurs assuré de l’ouvrir. Il s’agissait de ces fenêtres « alu », fenêtre des voyeurs, coulissant sur un train figé au mur. Vous voyez de jour comme de nuit tout, mais les autres ne vous voient pas. Un courant de vent n’aurait pu la fermer. Au début, je me disais que j’avais un problème de mémoire. Je rentrais trop épuisé souvent et dormais sans m’en rendre compte. Puis j’ai pensé aux esprits…

J’ai aussi pensé à une femme de nuit, une ex fâchée qui se vengeait, un voisin envieux… mais bien que n’étant pas un bon coup, j’ai toujours réussi à garder de bonnes relations avec mes ex et je ne connaissais pas les voisins. Je n’aime pas les ventilateurs, ils me rendaient malades, si bien qu’il me fallait la fenêtre grande ouverte la nuit et dormir sous les murmures de la lune. Et hier nuit, je m’étais assuré de l’ouvrir, non j’ai fait plus que ça, je l’ai écartée et j’étais resté là, accoudé, humant l’obscurité et espérant.

Il fallait que je sache, je n’en dormais plus. Il me faut des caméras, installées partout.

C’est étrange toutes ces choses d’espionnage si accessibles aujourd’hui. En une demi-journée, tout était installé. Cela me mit mal à l’aise, mais je n’avais prévu aucune visite galante et à part ma propre vie, personne d’autre ne souffrirait de cette intrusion.

La nuit vint. Je restai éveillé plus longtemps que prévu. Puis j’eus des instants de perte et d’éveils. Je m’enfonçai dans les draps du maître du sable.

Le jour vint. Je me jetai sur l’appareil. Je vis le film et sur l’image, je me voyais me lever, nu, frissonner et fermer la fenêtre avant de retourner dormir comme un bébé.

FIN

Urbain AMOUSSOU

GROSSIS!

GROSSIS !

Lorsque Richard avait commencé à prendre quelques graisses ici et là, tout le monde trouvait cela normal. Il était politicien, en plus d’être riche et ce n’était un secret pour personne que les meilleurs politiciens du pays, les plus influents avaient un embonpoint affiché, avec fierté. Certains avaient d’ailleurs commencé à le surnommer le prince Djobo. Il en souriait largement. En un mois il avait dû prendre au moins quinze kilos. Il est vrai qu’il restait plus souvent à la maison maintenant, à cause de la COVID. De toute manière, l’hémicycle ne lui manquait pas vraiment. Ils ne faisaient qu’y valider des décisions prises au plus haut de la hiérarchie.

Au début, il devait faire dans les 79kilo. Puis il passa à 95, bientôt, 98. Instinctivement il essaya de se contrôler pour ne pas dépasser les 100. Il diminua la quantité de nourriture ingurgitée. Du copieux petit déjeuner, de bacon, œufs brouillés, jambon, pain, haricots bouillis et ramollis… il passa à uniquement des œufs à la coque et du café. Il sauta le déjeuner et le soir il ne prenait désormais que des fruits, mais rien n’y fit. Un matin il se leva et sa balance de bain lui montra 123 Kilos. Du jour au lendemain. Il eut envie de jeter la machine, mais cela aurait pour conséquence d’alarmer sa femme. Il respira un coup et sifflotant il rejoignit sa dame.

« Tu es à combien chéri » ?

Les femmes posent toujours des questions à problèmes, pensa Richard en grommelant. Il n’était plus vraiment certain de ce qui l’avait énervé, mais il eut l’appétit coupé. La femme comprit, et eut pitié pour son mari mais surtout pour la machine électronique qu’elle lui avait offerte. Elle irait vérifier après. Elle se précipita pour lui glisser quelques fruits dans la voiture. Elle commençait vraiment à s’inquiéter. Elle voyait son homme gonfler sans vraiment savoir pourquoi. Pourtant elle était témoin de son abandon, au jour le jour, de la nourriture grasse.  Pourtant rien ne changeait, il continuait à prendre poids, comme un cochon trop et mal nourri. Bref elle ne comprenait pas.

Quand Richard atteignit 188, le plus dur n’était plus vraiment le poids, mais les difficultés de la vie de tous les jours : se baisser pour attacher ses lacets, rentrer dans sa voiture, respirer, rentrer dans ses habits, marcher, voire dormir. Puis brusquement d’une nuit à un matin, il dépassa les 200 kilos. Et le lendemain il n’arrivait plus à se lever du lit. Son point de gravité allait d’une partie à l’autre du corps et il n’appartenait plus à son squelette d’origine de porter cet être étranger. Deux jours après il avait pris 50 kg de plus. Les médecins mobilisés en vitesse n’eurent aucune explication. On fit venir un bulldozer pour le sortir de sa chambre en cassant la fenêtre.

Un avion spécial fut affrété pour le Prince Djobokou. Les autres avaient ajouté le « kou » parce qu’il avait dépassé la limite du djobo et approchait d’une mort certaine.

Il arriva en France le même jour et fut admis dans un hôpital où les dignitaires africains venaient souvent régler leurs nombreux problèmes de santé ou y mourir au calme. Les meilleurs médecins arrivèrent, alléchés par l’argent, mais aussi, curieux de cet africain qui prenait 50kg chaque deux jours. Certains tracèrent des courbes de morbidité, d’autres tentèrent des injections, voire coupèrent des choses ici et là sur le corps gargantuesque de Richard, rien n’y fit. Curieusement ce fut un Raoul Leblanc qui proposa innocemment d’aller voir les marabouts.

Retour en Afrique donc deux jours après. Le nouvel avion avait dû être découpé pour élargir l’entrée. Un soleil tout radieux accueillit le débuté, pourtant il n’eut pas ce plaisir, tout africain, d’être ébloui. Une chair visqueuse avait envahi son visage. Il y avait encore plus terrible et basique. La chair avait à profusion bloqué tous les trous et l’anus, les yeux, le nez, les oreilles, le trou de miction, tout était fermé par une chair purulente. Il souffrait tant. Les doses éléphantesques de calmants ne servaient plus à rien, tous ses médicaments se retrouvant bloqués par la graisse.

Ce fut sa femme qui lui annonça la nouvelle, avec un mégaphone braqué sur sa tempe : il fallait retourner à Laokpé.

Au début, il ne comprit pas, les messages des marabouts et des divinités étant toujours ambigus. Puis ça lui revint. Si ceux qui étaient là avaient pu voir ses yeux, désormais internes, ils auraient compris aussi : la vérité du péché. Il avait renversé la dame d’un vieux à Laokpé. Tout avait été réglé en deux jours et à peine 500 000f. Le vieux n’avait cessé de pleurer sa femme morte et le jour de l’enterrement au moment où, goguenard, il présentait des excuses à peine claires, le vieux s’était rapproché et avait lancé un « grossis » incompréhensible. Tout le monde avait explosé de rire lui y comprit, pensant que le pauvre homme essayait de baragouiner sa douleur en un français approximatif.

Richard fut transporté la nuit même dans un camion benne et ils débarquèrent à Laokpé. Le village dormait déjà. Il s’était déplacé avec du monde, toute une garnison d’hommes armés et la localité fut envahie. Les villageois, réveillés et délogés de leur case en pleine nuit, étaient déjà furieux.

La situation fut expliquée au chef, qui dans la langue du milieu passa le message aux villageois. Un grand silence tomba. Une minute, deux minutes, 10mins.

Le chef fit signe et un jeune revenu de la ville, qui expliqua dans un français impeccable à Richard et ses gardes du corps, que « le vieux était mort de chagrin une semaine avant ».

FIN

Urbain AMOUSSOU